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Crédits aux particuliers, les taux vont-ils remonter

Xerfi Canal TV a reçu Michel Mondet, président d’Akeance Consulting, pour décrypter un phénomène assez particulier de la conjoncture : le coût du crédit aux particuliers qui reste durablement bas. Une interview menée par Thibault Lieurade.

Michel Mondet, vous êtes président d’Akeance Consulting . Xerfi Canal TV vous reçoit pour décrypter un phénomène assez particulier de la conjoncture : Nous voulons vous parler du coût du crédit aux particuliers qui reste durablement bas.

Alors première question : comment l’expliquez-vous ?

L’explication est à la fois simple et complexe. Simple parce que l’argent est comme toute matière première. Quand le coût de l’argent est bas, alors les taux de crédit sont bas. Le coût de l’argent, c’est le taux directeur de la banque centrale européenne. Il est de 0,05% aujourd’hui (les dépôts à la BCE sont même négatifs à -0,2%). Par ailleurs, plus le taux d’emprunt de l’argent est long, plus le taux est élevé. Or, aujourd’hui, ce n’est plus le cas : les taux longs sont comparables aux taux courts (0,25% à 5 ans et 0,56 % à 10 ans). On dit alors que les courbes de taux sont « plates ». Complexe, parce que le prix de revient de l’argent pour une banque est aussi compliqué que pour une industrie. Il faut ajouter au coût de l’argent, le coût du risque de taux, le coût du risque de liquidité, le coût du risque de contrepartie et le coût de gestion du crédit lui-même. Les taux de crédit sont donc très bas aujourd’hui parce qu’essentiellement le coût de l’argent est très bas, à court comme à long terme.

Mais alors, dans ces conditions, pourquoi tout le monde ne se précipite-t-il pas aux guichets de banque pour s’endetter ?

C’est ce que je vous recommande de faire ! Blague à part, c’est encore un peu plus complexe que cela. Vous avez d’un côté des taux de crédits très bas et les pouvoirs publics s’en félicitent pour faciliter l’investissement et donc la relance. C’est toute la stratégie de la BCE. Mais les mêmes pouvoirs publics s’organisent pour réglementer toujours plus le monde bancaire au titre –certes louable- de protéger à la fois le consommateur et la solidité du monde bancaire. C’est un peu schizophrénique : on accélère d’un pied et on freine de l’autre.

Que vont donc faire les banques ?

Les banques sont coïncées en quelque sorte dans un étau, entre la volonté de distribuer des crédits – c’est leur métier ! – à très faible marge voire à perte (concurrence oblige..) et le coût de refinancement de ces crédits qui n’est pas aussi bas que je viens de le dire. Il faut en effet tenir compte d’une rémunération de l’épargne souvent trop élevé par rapport au coût de l’argent. Le PEL (2%)et le livret A (1%), produit d’épargne encadrés, sont ostensiblement trop bien rémunérés eu égard au coût de l’argent. Politiquement, c’est bien pour les épargnants, financièrement c’est un contresens pour les banques.

Cela veut-il dire que les banques ne vont plus octroyer autant de crédits ?

Non, pas nécessairement. Mais les banques n’ont plus de marge de manœuvre sur les crédits à l’immobilier. D’une part, on vient de le voir, le coût de refinancement est finalement trop cher par rapport aux taux de crédit octroyé, pour permettre de couvrir tous les coûts du risque. D’autre part, il y a encore quelques mois, le fait de ne pas avoir de courbes plates (j’en ai parlé il y a quelques minutes) permettait d’arbitrer les durées de refinancement et de dégager une marge financière, qui, le cas échéant, pouvait permettre d’améliorer le taux de crédit immobilier octroyé au client. Ce n’est plus le cas aujourd’hui.

Alors, les taux de crédit à l’immobilier vont nécessairement remonter, si je comprends bien…

C’est une des options effectivement. Mais on peut également espérer un maintien de ces taux aussi bas, de la manière suivante. La demande est faible et les encours de crédits dans le bilan des banques se réduit parfois. Dans ces conditions, beaucoup de banques envisagent de pousser les feux sur les crédits pour mieux mutualiser leurs coûts de refinancement cher et moins cher. Le volume fera baisser le taux de refinancement moyen et permettra donc de maintenir des taux de crédit bas."

 

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